jeudi, 18 août 2016
Usage judicieux des antibiotiques chez les animaux d’élevage
Le tiers des antibiotiques prescrits aux humains serait utilisé à mauvais escient pour traiter un virus ou pour se rassurer apprenait-on dans les médias cette semaine. Avec l’antibiorésistance qui gagne du terrain, ce n’est pas rassurant. Le secteur des animaux d’élevage est souvent pointé du doigt à cet égard car trop d’antibiotiques y seraient utilisés de manière préventive. Or, un article paru dans la Terre de chez-nous hier apporte un point de vue rassurant en mettant les pendules à l’heure.

Dr Simon Dufour. Source image UdeM
Simon Dufour, vétérinaire et professeur à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal explique entre autre le cas des producteurs laitiers. Lorsqu’on utilise un antibiotique, il faut mettre l’animal en quarantaine et jeter le lait produit durant un laps de temps non négligeable. Les règlements sanitaires sont très stricts sur la question. Il est vrai aussi qu’on administre des antibiotiques, parfois, lors d’infection virale pour prévenir une surinfection d’origine bactérienne. Dr Dufour donne comme exemple le complexe respiratoire bovin causé par un virus. Les complications bactériennes dangereuses étant fréquentes, un antibiotique est alors envisagé. « Quand les veaux viennent d’être sevrés et qu’ils changent d’étable, le contact avec des microbes extérieurs peut leur faire développer le complexe respiratoire bovin. Et si on ne leur donne pas d’antibiotiques pour prévenir les surinfections, ils meurent» explique le vétérinaire.
Une utilisation préventive d’antibiotiques dans ce cas peut-elle contribuer à l’antibiorésistance? La question se pose dans la mesure où l’usage d’antibiotiques chez les animaux d’élevage est souvent mis en cause pour expliquer le phénomène. Le Dr Dufour met les choses en perspectives à l’intention des lecteurs de la Terre de chez nous : « Chez les bactéries qui affectent les vaches laitières, on retrouve très peu d’antibiorésistance, probablement parce que les producteurs ne traitent qu’en dernier recours. Et dans le domaine aviaire, l’industrie a déjà arrêté d’utiliser un antibiotique afin de protéger l’humain, qui utilise ce même antibiotique. » De plus, poursuit-il, l’industrie pharmaceutique axe de plus en plus ses priorités dans les traitements préventifs tels les vaccins plutôt que dans le réactif soit les antibiotiques. Et ce n’est pas tout, l’Agence de santé publique du Canada et son Programme intégré canadien de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (PICRA) assure une surveillance nationale. « En agriculture, on est très partisans de ce qu’on appelle faire un usage judicieux des antibiotiques. On ne suggère pas nécessairement de les réduire ou de les arrêter, mais bien de mieux les utiliser», termine le Dr Simon Dufour.
Par Ricardo Codina