mercredi, 25 juillet 2018

Médecine curative, portrait de Dr Simon Verge

Par Ricardo Codina

Le journal la Terre de chez-nous a publié un bref portrait du Dr Simon Verge dans son édition du 20 juillet. Membre de l'AMVPQ, impliqué dans l'Ordre des médecins vétérinaires du Québec à titre d'administrateur depuis 2008 et deuxième vice-président en 2014, on y apprend qu'il est spécialisé en médecine curative des troupeaux laitiers.

Certes, on parle surtout de prévention pour éviter le curatif actuellement, mais ce serait jouer à l'autruche que de penser que le curatif disparaîtra un jour complètement. C'est dire l'importance d'avoir un spécialiste en curatif, en imprévu, dans une équipe comme le Bureau vétérinaire de Richmond ou Dr Verge est associé.

J'ai eu le plaisir de visiter le Bureau vétérinaire de Richmond à deux reprises ces dernières années (voir autres textes à la fin). C'est une entreprise qui qui sert une clientèle allant de la Montérégie à l'Estrie en passant par le Centre-du-Québec. Le Dr Simon Verge visite, aux deux à trois semaines ses clients. Dans les faits, chaque jour il visite quelques troupeaux. Il déclare à la journaliste de La Terre de chez-nous : « On se rend chez le producteur. Le service se fait à domicile; on connaît bien la famille et tout le monde qui travaille sur place ».Dr Verge préfère soigner les bovins laitiers et grands animaux depuis un stage fait il y a quelques années.

Certains de ses collègues travaillent avec les producteurs en préventif : alimentation, reproduction, gestion de l'élevage, quotas pour assurer la rentabilité de l'entreprise. De son côté, même s'il en fait, le Dr Simon Verge préfère travailler sur le plan curatif. À cet égard, il déclare à la Terre de chez nous : « Il y a des cas où je suis l’anesthésiologiste, le chirurgien et celui qui fournit la prescription ».Dans toutes ses interventions auprès des grands animaux, il ne perd jamais de vue que la médecine vétérinaire ne doit pas nuire aux objectifs de rentabilités de l'entreprise et son rôle conseil à cet égard est important.

Pour faire du curatif sa spécialité, il faut être prêt à être flexible dans ses horaires et la conciliation travail-famille« On doit parfois agir dans l’urgence. Il faut organiser un système de garde [surtout les week-ends], car il doit toujours y avoir un vétérinaire joignable » déclare-t-il à la Terre de chez-nous.

En conclusion, le Dr Simon Verge rappelle que pour qui s'intéresse à la médecine vétérinaire, il faut d'excellents résultats scolaires car c'est très contingenté comme programme. Mais ce n 'est pas tout, le futur médecin vétérinaire praticien doit être humain, doté d'un grand sens de l'empathie. Pourquoi? Parce qu'il doit conseiller judicieusement ses clients au moment de prendre d'importantes décisions ou comptabilité et émotivité doivent se conjuguer.
 
 
Le Dr Walter Verhoef et l’équipe du Bureau vétérinaire de Richmond
Par Ricardo Codina (pour Le  Praticien)

Le Dr Walter Verhoef a reçu le prix du praticien lors du congrès annuel de l’AMPVQ à Orford en septembre 2014, un congrès coordonné par de jeunes médecins vétérinaires praticiens qu’il apprécie. C’est un prix dont il est très fier car c’est une reconnaissance des pairs. De plus, c’est un congrès dont il a présidé le comité organisateur en 2002 à Sherbrooke. Ce cadeau était pour lui une surprise qu’il a apprécié, car le Dr Verhoef est un homme pudique et de se savoir d’avance ainsi honoré l’aurait beaucoup stressé. Lors de la remise du prix, il a spontanément invité tous les collègues du Bureau vétérinaire de Richmond, présents dans la salle, à monter sur la scène avec lui. Il explique le geste par le fait qu’il est d’abord et avant tout un gars d’équipe. Et l’équipe dans laquelle il œuvre depuis trente-six ans est innovatrice, créative et impliquée. Il estime d’ailleurs que n’importe quel membre de cette équipe aurait pu recevoir le prix. Il pense, entre autres et de manière non-exhaustive, à Roch Bourassa un associé maintenant à la retraite mais longtemps impliqué dans l’Ordre, à Lucien Chagnon, qui fut président de DSA et ensuite Lactologic, à Simon Verge qui fut délégué à l’AMVPQ et qui siège désormais sur l’exécutif de l’Ordre et est très impliqué dans la refonte de la loi des médecins vétérinaires et à Pierre-Luc Charbonneau qui est présentement au Conseil de DSA. Le Dr Verhoef explique qu’il est fier d’accepter et de partager cet honneur avec les membres du Bureau vétérinaire de Richmond.
Né aux Pays-Bas en 1955, Walter Verhoef est arrivé au Québec à l’âge d’un an et demi. Ses parents, des agriculteurs locataires dans leur pays d’origine, rêvaient d’être propriétaires et c’est au Québec qu’ils ont choisi de le devenir tout juste avant la révolution tranquille. Le futur médecin vétérinaire a donc vécu sur la ferme laitière familiale dans la région de Richmond en Estrie. Ce fut une vie familiale sur la ferme dont il garde un très beau souvenir. Il souhaitait d’ailleurs devenir agriculteur, mais des allergies à la poussière l’en ont empêché et c’est pour ça qu’il a choisi un métier connexe : la médecine vétérinaire pour grands animaux avec spécialisation en bovin laitier. Le diplôme en main en 1979 il est tout naturellement rentré en fonction au Bureau vétérinaire de Richmond. À l’époque c’était une équipe de trois personnes, en médecine mixte. Depuis, l’entreprise a déménagé deux fois et compte aujourd’hui cinq associés (Dr Walter Verhoef, Dr Lucien Chagnon, Dr Simon Verge, Dr Jean-François Millette et Dr Pierre-Luc Charbonneau) et six médecins vétérinaires employés (Dr Alexandre Verville, Dre Judith Lapalme, Dre Isabelle Maheu, Dre Josiane Labonté, Dre Stéphanie Guérin et Dre Geneviève Noiseux ). L’expansion de ce bureau vétérinaire est due au fait que l’équipe a su développer des services conseils en médecine de production ainsi qu’en transfert embryonnaire.


La pratique était davantage curative au début mais désormais le préventif est tout aussi présent et permet d’éviter bien des problèmes de santé animale. À propos de prévention et cueillette de données, le Dr Walter Verhoef a été président de l’ASTLQ, une société de recherche financée en grande partie par plusieurs vétérinaires praticiens et menée par une équipe de chercheurs de la FMV de l’Université de Montréal tout juste avant son incorporation pour devenir le DS@HR. Le logiciel DSA permet un suivi informatique de la santé des troupeaux laitiers (et non seulement pour la santé du pis). Le Dr Verhoef a été l’un des trois ou quatre premiers à utiliser l’ordinateur dans l’étable en 1991. L’aspect scientifique de la profession passionne l’équipe du Bureau vétérinaire de Richmond. À preuve, l’Idexx, un laboratoire portatif d’analyse sanguine et hématologique surtout présent dans les cliniques pour petits animaux, vient d’être installé à Richmond pour le bovin laitier et l’équin. Lors de notre visite, des analyses avaient cours. C’est, pour le Dr Verhoef, une valeur ajoutée rapide et efficace pour la clientèle. L’information scientifique doit aussi être communiquée, c’est pourquoi le Dr Verhoef a donné plusieurs conférences et ateliers. Au CSTLQ avec le Dr Jérôme Carrier et Jean-Philippe Roy de la FMV ou, seul, au Symposium des Bovins laitiers.
Ces communications servent à la profession mais aussi aux producteurs laitiers. Cela permet de faire évoluer le préventif-conseil avec des producteurs aujourd’hui plus autonomes. Cela veut dire que les cas curatifs qu’on réserve aux praticiens sont plus complexes. Les journées sont peut-être moins longues qu’il y a 35 ans où le curatif prenait presque toute la place, mais lorsqu’on appelle le médecin vétérinaire praticien pour soigner un animal force est d’avouer que ce sont des cas plus compliqués et le vétérinaire est plus directement impliqué dans la gestion de la santé du troupeau ce qui ajoute un peu au stress. Le Dr Verhoef a travaillé très fort, à titre de représentant de l’AMVPQ sur le comité qui a mis en place le programme volontaire de prévention et de contrôle de la paratuberculose. Il travaille également beaucoup auprès de la clientèle à propos de l’usage judicieux des antibiotiques dont l’usage préventif doit être découragé au profit de traitement plus ciblés. Parlant d’implication à l’AMVPQ, le Dr Verhoef a été délégué de la région de l’Estrie à l’AMVPQ à partir de 1999. Puis membre de l’exécutif de l’AMVPQ au tournant des années 2000 pour devenir vice-président en 2007 pour une durée de trois ans. En 2010 il laisse la vice-présidence à la relève, termine son mandat de délégué et depuis a ralenti un peu le rythme. En effet, il est actuellement en poste quatre jours par semaine. Il avoue préférer l’aspect scientifique qu’administratif de la profession.
Et il partage cet intérêt avec d’autres membres de l’équipe. Lors de mon passage au Bureau vétérinaire de Richmond le 1er décembre dernier, Dr Verhoef me présente le Dr Simon Verge qui revient de chez un producteur. Ce dernier m’explique que le Bureau vétérinaire de Richmond a fait plus de 1000 laparoscopies en position debout. C’est une technique opératoire dont les avantages sont évidents et pour le confort de l’animal et pour la facilité d’exécution du praticien. C’est également une technique que l’on retrouve beaucoup aux Pays-Bas d’où est natif le Dr Verhoef.
Avec une carrière aussi riche mais occupée, comment concilier travail et vie personnelle? Au début de sa carrière, c’était très difficile confie le Dr Verhoef. La médecine curative à toute heure du jour et de la nuit appartient au passé. Certes, il y a toujours des gardes, mais le nombre de collègues et la prévention aidant, c’est plus facile aujourd’hui. Ceci étant dit, il avoue que la vie familiale qu’il a connu avec ses parents sur la ferme laitière, il n’a pas pu la reproduire avec ses sa femme Dominique et ses deux fils (27 et 28 ans). Il espère se rattraper avec ses petits-enfants. Il estime que les jeunes professionnels d’aujourd’hui en santé animale pourront mieux concilier travail et vie personnelle que les gens de sa génération et c’est tant mieux.
Il reste encore au Dr Verhoef quelques années pour transmettre ses connaissances à sa clientèle et aux collègues plus jeunes en matière de bien-être animal, un dossier qui le passionne. C’est important, pour lui, de sensibiliser les producteurs aux préoccupations du consommateur. Pour la plupart, les producteurs ont investi beaucoup dans le logement afin d’assurer le plus grand confort possible à leurs animaux et ce, depuis plusieurs années. Certains d’entre eux ont tout avantage à suivre le programme Pro Action qui est un pas dans la bonne direction en matière de notation du bien-être animal. Mais le producteur n’est pas seul à devoir faire sa part dans ce dossier. Il faudra également penser à éduquer le consommateur sur ce qu’est le bien-être animal dans un cadre de production d’aliments. En effet, l’image bucolique de la vache qui broute au pâturage sous un beau soleil n’est peut-être pas l’idéal pour sa génétique de productrice laitière de haute performance. En effet, ses besoins alimentaires très exigeants font en sorte que le pré ne répondrait pas à ses besoins et que les grosses chaleurs d’été lui seraient difficiles à supporter. Son bien-être exige une étable ventilée et peu de déplacement pour se nourrir. Ceci dit, la race Holstein, quoi que très performante, a certains défis à relever entre autre au niveau de la fertilité des vaches. Certaines solutions pourraient venir d’un programme de croisement préparé par un conseiller qui connaît le domaine. Ce serait intéressant de suivre un tel troupeau. Mais il n’y en a pas pour l’instant parmi la clientèle du Dr Verhoef.
En terminant, j’ai échangé quelques courriels avec le Dr Verhoef après mon passage au Bureau vétérinaire de Richmond. Dans l’un d’eux il m’explique combien son séjour de douze années à l’AMVPQ a été significatif dans sa vie professionnelle. Il est extrêmement fier d’avoir participé à l’évolution de l’association parmi des personnes exceptionnelles qui ont à cœur leur profession. Les dossiers importants qu’il a retenus durant son parcours en son sein sont l’achat de DS@HR, la création d’un poste de vétérinaire conseil et une présence concrète sur plusieurs comités dans le but de valoriser les services offerts par les médecins vétérinaires. Il y a trente-cinq ans, rappelle-t-il, les services en médecine curative étaient clairement du domaine vétérinaire. Désormais, les services vétérinaires en production et en conseil sont dans une zone plus grise et ne sont pas nécessairement l’exclusivité du médecin vétérinaire. Ceci étant dit, le Dr Verhoef se dit convaincu que les médecins vétérinaires praticiens sont les plus aptes à offrir ces services d’où l’importance d’une AMVPQ forte et impliquée. C’est pourquoi il est rassuré de voir la relève s’y investir.

Dr Lucien Chagnon : une vie consacrée à l’amélioration de la pratique vétérinaire auprès des bovins laitiers

Par Ricardo Codina (pour  Le Praticien)

Pratiquant au Bureau vétérinaire de Richmond en Estrie depuis 1984, année où il reçoit son diplôme en médecine vétérinaire, le Dr Lucien Chagnon m’invite à le rencontrer à Acton Vale où il demeure et où presque toute sa clientèle est installée. Il sera ainsi plus facile d’aller à la rencontre des producteurs laitiers qui font affaires avec lui. Fils de producteurs laitiers lui-même, il décide de soigner les bovins laitiers plutôt que d’en élever comme ses parents et grands-parents, laissant la ferme familiale aux bons soins de son frère René. Même s’il lui est arrivé de soigner des animaux de compagnie en début de carrière, il est depuis près de trente ans totalement dévoué à la santé des bovins laitiers. Il est très fier de l’équipe de 11 médecins vétérinaires du bureau de Richmond, équipe de grande qualité alliant compétence et entregent, deux aspects qu’il juge essentiels.
Le samedi 9 juillet au matin, je me rends donc à son domicile à Acton Vale. J’y suis accueilli par deux magnifiques bouviers bernois trop heureux d’avoir de la visite. Les maîtres ne sont pas loin, le Dr Lucien Chagnon et sa conjointe Suzanne Fontaine aiment visiblement les animaux. Le couple m’explique que leurs deux enfants, Olivier (30 ans) et Alexandrine (29 ans), sont désormais grands et ne demeurent plus au domicile familial. Ceci dit, nous ne sommes pas en présence de deux rentiers. Mme Fontaine travaille toujours dans son domaine, la comptabilité, et le Dr Chagnon, à 55 ans seulement, ne songe pas du tout à une retraite à court ou moyen terme. La pratique le passionne toujours et, comme il l’a toujours fait, il est impliqué dans divers projets connexes. Outre son implication professionnelle au Bureau vétérinaire de Richmond, le Dr Chagnon est très impliqué présentement dans les projets de vie de ses deux enfants depuis environ cinq ans.


Il est associé depuis près de trois ans avec un autre producteur et son fils Olivier dans une ferme laitière à St-Théodore d’Acton. Lui qui n’avait jamais pensé être producteur laitier, l’est par association depuis quelques années. C’est en fait le projet de vie de son fils, dont c’est là la seconde expérience en production laitière. Un premier projet de 25 vaches en lactation a fait place à celui-ci de 50 vaches en lactation à la Ferme Dubosson. Dr Chagnon m’amène avec sa camionnette de service à cette propriété. Étant de garde aujourd’hui, tout l’équipement est prêt à être utilisé s’il devait recevoir un appel d’urgence. En faisant le tour des bâtiments, nous constatons la rigueur et le soin apporté par Olivier à ses animaux et ses installations. Des rénovations récentes au niveau des portes, fenestration de l’étable et ventilation sont évidentes mais selon un plan d’investissement sain et bien calculé.
Ayant dans la famille une certaine expérience en gestion d’entreprise et comptabilité, ils essaient d’éviter le surendettement. Pour illustrer cela, le Dr Chagnon me montre la machinerie agricole à l’extérieur de l’étable qui se limite à un simple tracteur pour transporter les lourdes bottes de foin et un élévateur. Autre source de fierté, le Dr Chagnon m’explique que la Ferme Dubosson a un cheptel d’une bonne génétique ou le transfert d’embryons a servi à améliorer la qualité du troupeau au fil des ans. Le tableau d’excellence (12 Ex, 28 TB, 5 BP) qu’il me montre à propos du troupeau prouve ses dires. Mais cette ferme n’est pas qu’un investissement dans le projet de vie d’Olivier, c’est aussi s’adapter à la vie de producteur avec la traite matinale qu’il fait régulièrement.


Autre projet dans lequel le Dr Chagnon a investi est celui de sa fille Alexandrine soit un chalet aux Îles-de-la-Madeleine. Elle s’y trouve d’ailleurs au moment même où nous nous parlons. Le chalet est mis en location lorsque la famille Chagnon ne l’occupe pas. Il faut donc planifier et gérer les arrivées et départs selon un calendrier précis. Cela se déroule tellement bien qu’il n’est pas impossible de procéder à l’acquisition d’un second chalet. C’est Alexandrine qui s’occupe des locations et des employés engagés sur place pour la maintenance. La fille du Dr Chagnon a travaillé en design de mode avant de se réorienter et compléter se maîtrise en ergothérapie; elle possède une maison à la campagne à Upton où nous nous rendons. Une magnifique propriété campagnarde et Dr Chagnon lui a donné un coup de pouce pour la mise de fonds. Son choix est d’aider ses enfants au moment où ils en ont besoin pour réaliser un projet, et non de les laisser à eux-mêmes, et ainsi ils pourraient rater de belles opportunités.
Auparavant, en plus de sa pratique médicale, il s’est grandement impliqué dans des projets connexes visant l’amélioration de la pratique vétérinaire auprès des bovins laitiers. Nous nous installons dans un petit café en bordure de l’autoroute 20 pour en discuter.


Ayant depuis le début de sa pratique à Richmond à cœur la réussite de sa clientèle, il fallait faire à cette époque la transition entre la médecine curative et la médecine préventive. Il n’existait que peu de systèmes organisés de suivi de troupeau et le Bureau vétérinaire de Richmond était à la recherche du meilleur outil disponible. Dr Chagnon et Dr Verhoef ont entrepris une tournée de quelques cliniques et analysé les outils utilisés. Puis durant cette même période est arrivée l’annonce du projet ASTLQ, projet de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. Le prototype de logiciel DSA mis au point par trois médecins vétérinaires (Émile Bouchard, Denis du Tremblay et Michel Bigras-Poulin) lui semblait alors la meilleure avenue. Vers 1990, le Bureau vétérinaire de Richmond embarquait dans l’aventure, comme plusieurs autres cliniques, en investissant 20 000$ pour faire partie du projet en rodage et obtenir la formation adéquate. Grâce à une cinquantaine de cliniques, ASTLQ (ancêtre de DSAHR) a pu avoir accès à des liquidités de près d’un million de dollars pour développer le logiciel et donner de la formation pour les médecins vétérinaires grâce au travail acharné des trois chercheurs. Le Dr Lucien Chagnon a alors accepté de s’impliquer à titre de responsable du comité de liaison, dont l’objectif était de faire le lien entre les chercheurs et les utilisateurs, d’apporter idées et pistes d’amélioration aux chercheurs.
Quelques années plus tard, le projet est devenu une entreprise à part entière, plusieurs cliniques ont quitté, mais une vingtaine d’entre elles sont restées actionnaires du projet. Le Bureau vétérinaire de Richmond est demeuré copropriétaire. Différentes personnes ont agi comme administrateur de DSAHR Inc., dont le collègue du Dr Chagnon au Bureau vétérinaire de Richmond, le Dr Walter Verhoef, qui a été président du CA.  Par la suite, le Dr Lucien Chagnon a été administrateur ou président pour un total d’environ une dizaine d’années. C’est le Dr Lucien Chagnon qui présida le CA lorsque fut préparé la transition vers l’acquisition par l’AMVPQ. Les propriétaires d’alors jugeaient qu’il était temps que cet outil devienne la propriété de chacun des vétérinaires praticiens du Québec.
C’est aussi l’époque de la création de Lactologic et son projet du logiciel Lac-T pour la création d’un logiciel unique à l’intention des producteurs laitiers. Lactologic a trois actionnaires : Valacta (de la Fédération des producteurs de lait du Québec), SIGA et DSAHR. Dr Chagnon a été le premier président de Lactologic inc. Ce projet est venu entre autres d’une volonté de la Fédération des producteurs de lait du Québec que les producteurs aient un logiciel unique. Il y avait une opportunité à saisir alors pour DSA. C’était ça ou la Fédération se tournait vers DairyComp, un logiciel déjà existant ailleurs. Présentement, le processus d’intégration de Lac-T, bien qu’il soit plus long que souhaité, se poursuit. DSA Laitier-Vétérinaire est apte à s’y connecter, tout comme avec DSA Laitier-Producteur qui est toujours utilisé par beaucoup de producteurs. Donc, présentement, Lac-T et DSA Laitier-Producteurs sont tous deux propriétés de Lactologic et maintenus en développement.
Côté DSA Laitier-Vétérinaire, l’utilisation est très répandue et les ventes sont en bonne progression du côté Européen; c’est un logiciel qui sait s’adapter aux praticiens et leurs clients, les producteurs laitiers. Un logiciel de médecine préventive qui fait le lien avec divers logiciels mondiaux existants maintenant en gestion de troupeau. Parce que c’est ça le but ultime pour DSAHR : avoir un outil qui permet aux vétérinaires de se connecter avec les données de la ferme, sous quelques formes que ce soit, pour pouvoir fournir une expertise médicale de qualité aux producteurs de lait.

Que de chemin parcouru par rapport à l’époque où l’informatique à la ferme était inexistante. Il a fallu faire beaucoup de développement mais aussi beaucoup de formation au fil des ans pour arriver à un tel résultat. Les premières années, cela était sous la responsabilité du comité de liaison présidé par le Dr Chagnon qui faisait venir des conférenciers réputés des États-Unis, pour parler de l’utilité d’outils informatiques de gestions de troupeaux et de médecine préventive. Beaucoup de ces formations furent reconnues par l’Ordre de médecins vétérinaires du Québec, reconnaissant ainsi leur importance. Dre Virginie Filteau, qui fut directrice générale de DSA durant quelques années, a fait beaucoup en matière de formation. Présentement, sous la présidence du Dr René Bergeron, DSA poursuit son développement.
Comme autres implications professionnelles, le Dr Lucien Chagnon a siégé sur le Comité bovin laitier du CPAQ, devenu le CRAAQ, et sur le comité organisateur du Symposium sur les bovins laitiers. Souvent seul vétérinaire praticien en compagnie d’agronomes et autres professionnels, le Dr Chagnon a toujours trouvé fort intéressant de travailler en comité interprofessionnel pour faire entendre et avancer la médecine vétérinaire. Il me fait remarquer que depuis le début de sa carrière, il s’est toujours impliqué sur des projets durant des périodes d’environ cinq ans. Présentement, ses projets sont davantage personnels que connexes avec sa pratique. Mais, la retraite étant encore loin, il n’est pas dit qu’il ne s’impliquera pas de nouveau à un moment donné pour l’avancement de la pratique vétérinaire lorsque sa présence sera moins requise auprès de ses enfants.
La journée se poursuit en une tournée des environs. Tout d’abord la ferme familiale des Chagnon à Acton Vale aujourd’hui appartenant à son frère René. Ses parents, sont d’ailleurs toujours vivants (83 ans pour le papa et 81 ans pour la maman). Ces derniers furent déclaré famille agricole de l’année en 1994. Le Dr Lucien Chagnon est issu d’une famille de sept enfants (cinq garçons et deux filles). Tous, sauf un, travaillent en agriculture. La ferme des Chagnon est la plus grosse ferme laitière d’Acton Vale avec une superficie de 2 500 acres et 250 kg de quota.


Nous allons ensuite visiter la Ferme Belgarde, toujours à Acton Vale, appartenant à Jean et Pierre Vincent. C’est Jean qui nous y accueille chaleureusement. On m’y explique fièrement que le logiciel vétérinaire se branche au robot de traite. Le producteur laitier parle de l’importance d’une bonne relation entre le producteur et le vétérinaire. C’est une ferme bien organisée. Il avoue ne pas comprendre comment des producteurs n’arrivent pas au niveau du temps. Lui et son frère y parviennent fort bien et ont même du temps de libre chaque semaine, été comme hiver. Le Dr Chagnon croit que la réponse vient du fait que dans le cas des Vincent, comme bien d’autres de la région, c’est l’organisation du travail, peu de surendettement, une gestion serrée de troupeau et de la médecine préventive. Les fermes laitières de la région sont donc productives, organisées et vivent bien.


Les inquiétudes viennent du fait que la gestion de l’offre est souvent mise à mal et qu’on voit bien comment une dérèglementation est vécue en Europe notamment. Mais pour l’instant, c’est encore stable à ce niveau et l’optimisme est toujours de mise. C’est sur cette rencontre sympathique avec un fidèle client du Dr Chagnon que se termine la visite. Aucun appel d’urgence n’est rentré de toute la journée. C’est peut-être le résultat d’une médecine vétérinaire préventive de qualité? En tout cas, il ne souhaite pas de problèmes à ses clients. Si aucun appel d’urgence ne rentre, c’est que tout va bien!
Je quitte Acton Vale avec la certitude que le Dr Chagnon a encore de belles années à consacrer à ses clients avec le Bureau vétérinaire de Richmond. Je suis également convaincu que nous le retrouverons au courant des prochaines années impliqué dans un projet de l’AMVQP (AMVPQ), du CRAAQ, du MAPAQ ou auprès de toute instance nécessitant les bons et loyaux services d’un médecin vétérinaire praticien professionnel pour qui le travail d’équipe et la transmission du savoir à ses pairs, surtout les plus jeunes, est d’une importance primordiale.